Je rentre sous des trombes d'eau, le ciel zébré d'éclairs, et je repense à cette journée atypique. Des heures à remonter une rivière vide. la transparence de l'eau ne laisse voir aucun poisson, sidérant, même pas un alevin en fuite. hormis une grosse mémère qui nymphait par 2 m de fond dans un gour, seule princesse sur des centaines de mètres, et qui a laissé ma nymphe lourde à une petite sortie de nulle part, rien de rien de rien… Le vide absolu. et ce temps lourd, moite, cet air qui colle à la peau, la progression sur les rochers glissants est éreintante et je souffle comme une baleine. Les premières gouttes déclenchent une superbe éclosion de perles grises et jaunes, mais toujours rien sur l'eau. Le soir tombe et l'orage enfle. J'abandonne la nymphe pour une grosse sèche que je ballade dans les courants. Alors que je rembobine, un beau gobage, et un poisson de 30 cm sorti de nul part qui finit dans la besace numérique. Je rejoins la voiture sur ce demi succès mais l'atmosphère électrique me fait croire à un coup du soir miracle et malgré l'orage qui enfle sur les hauteurs je retourne à la rivière. Et là, sur une lisse déjà parcouru, des gobages, partout ! Je pose le pompon, un gros poisson décolle et happe mon imitation. Boosté par l'ambiance orageuse, la truite me propose un combat homérique, tout en puissance, le poisson recherche le fond, et la moindre inattention est exploitée pour sonder le dessous des rochers (au passage la truite aura fait fuir trois autres congénères lors de sa lutte !). Après la séance photo je sèche ma mouche mais je n'aurai pas l'occasion de tenter d'autres poissons, l'orage est presque au dessus de ma tête et la désagréable sensation de faire paratonnerre m'habite le temps de retrouver la voiture en courant (en poussant au passage quelques petits cris de trouille quand les éclairs tombent tout à côté)…
Il fallait être là le temps de ces 10 minutes d'intensité absolue, ingrate pêche à la mouche, fantastique pêche à la mouche !!