J’aurais dû partir plus tôt, monter dans la vallée même avec le très mauvais temps : il y aurait peut-être eu plus de mouches. Le soleil est revenu assez vite et en pleine lumière certains endroits ne sont pas beaux à voir. Eaux basses encore, grandes plaines que le vent remonte et qui ne semblent pas traversées par le moindre courant… Heureusement, au ras de berges rocheuses ou bien sous l’avancée de maîtresses branches quelques truites sont postées. A l’espère, on les voit peu actives, mais elles ne refusent pas l’insecte à la dérive. La piqûre du fer les fait réagir vivement, des chandelles se succèdent. Le combat de ces poissons est valeureux même si je n’ai rencontré que des individus entre 30 et 36 cm. La rivière s’anime quand les chapelets de canoés s’annoncent. Des jaunes, des rouges et des bleus qui se succèdent. Certains descendeurs saluent et font l’effort de passer discrètement, d’autres pleins de bonnes intentions font plus de mal que de bien quand les coques raclent les galets, ou quand les pagaies cognent la résine. Si vous êtes deux à prospecter un courant, vous devenez les portes d’un parcours descente ouvert à tous les niveaux de participants : Compère placé plus haut rouspète quand un engin vient le bousculer, je souris mais je me retourne plus souvent pour voir si rien n’arrive sur moi sournoisement… Pour les truites c’est fini. Les ombres eux sont capables de venir moucher dans le sillage encore visible des embarcations ! Ils montent sporadiquement, peuvent prendre une artificielle, mais aucun ne viendra à l’épuisette, ils aiment tellement mes mouches qu’ils les ont gardées… Les journées passent agréablement, s’il n’y a pas de truites ou d’ombres on se rabat dur les vandoises ; et puis les rencontres au bord de l’eau sont aussi des moments précieux… La brume qui se déchire lentement aux premières heures du jour, le chant de la rivière ou le courant file vite encore, moins de stress qu’aux grandes heures de la saison où il ne faut pas passer à côté de sa pêche, et des poissons plutôt difficiles, c’est cela aussi qui fait le charme d’une virée estivale.
