Sous l’arche orientale du pont , la vasque attire le regard; ses eaux ultramarines recèlent des trésors ondulant au sein des remous, gobinant d’imperceptibles créatures. Se couler dans l’ombre, appuyé à la paroi de schiste, éviter l’astre, sa luminescence sur l’attirail de pêche. Le nylon brille toujours trop ou bien le vernis de la canne ne semble jamais assez terni… Les ailes fumées de l’artificielle se distinguent parfaitement, quel plaisir que de regarder la truite convoitée basculer et venir la cueillir. Chaque fosse en abrite une bande; alignée, en ordre décroissant de bataille. Les coups de ligne paraissent aisés mais la pointe que je trouvais longue se prend à être aspirée par un contre-courant. Au bout de deux ou trois prises, les poissons de la bande s’enfoncent, sur leurs gardes, puis finissent par s’évanouir. Tout serait parfait si ce n’était cette écume soudaine longeant la roche, en une ligne serrée. Le soleil est déjà bas, sans doute les ablutions de l’amont… Les fonds d’ardoises bleutées du Cardos ont disparu, une algue brune, hostile, les recouvre désormais. Je ne me souvenais pas qu’il y eût de ces renoncules ondoyantes… Je comprends mieux ces truites plus dodues, insatiables gobineuses d’invisibles particules. Je repense à toutes ces grues de couleur criarde, à tous ces lotissements. Cardos, finiras-tu comme ton voisin Segre ?