Bonjour à tous, Ce jour tant attendu est enfin arrivé. Après une nuit intense en émotion où les march brown et les poissons les plus gros étaient bel et bien présent au rendez vous, il est temps de se frotter à la réalité. Sera t’elle aussi belle que dans mes rêves … Après une bonne heure de route, j’entraperçois la rivière, elle est magnifique, le niveau est bas, le ciel est un peu couvert mais ne menace pas, l’air est frais et les arbres sont dénudés. La journée s’annonce sous les meilleurs hospices, je sens le bonheur m’envahir et plus je m’approche du lieu choisi, plus je ne tiens plus en place. Il est temps que j’arrive … J’ai opté pour la Garonne et plus particulièrement la partie en no kill, 2km d’un superbe parcours qui jadis devait être bien peuplé en invertébré et en poisson. Qu’en sera t’il en ce jour d’ouverture 2008 ? Une fois garé, il me faut le temps d’un éclair pour être en habit de parade. Waders, gilet, lunette, casquette, épuisette, canne, moulinet sont au rendez vous, je suis fin prêt. Je monte une imitation de march brown en espérant que les gobages soient bien présent. Un pschitt de parfum et me voilà paré pour aller séduire ces dames. Je descends un petit chemin escarpée et me voilà au bord de cette grande et belle rivière qu’est la Garonne. Oh, je ne m’attends pas à voir quantité de truite mais j’ai bon espoir d’en faire au moins une. Un long lisse s’étend au dessus de moi. Je me pose sur un rocher et observe ce spectacle majestueux. La vie semble timide, quelques modestes mouches prennent leur envol, une bergeronnette a vite fait de les engloutir laissant peu d’espoir pour qu’une truite en fasse sont repas. Déjà 2 heures que j’attends et rien sur l’onde n’a attiré mon attention. Vais-je devoir passer en nymphe et prospecter à l’aveugle. Privilégiant la pêche à vue, c’est une déception. J’hésite, je tergiverse et soudain, j’aperçois au loin une lumière intense qui se rapproche de moi. Qu’est ce que cela peut bien être … Elle approche et fini par m’entourer, cela chauffe mais c’est un sentiment agréable alors je laisse cette étrangeté m’envahir. Puis d’un coup, je me sens transporté, la lumière disparaît et me voilà sur le même rocher devant le même lisse. Mais il y a comme quelque chose de différent. Un peu perdu, je regarde ma montre et il est 12h, l’heure à laquelle je venais d’arriver. Je ne comprends pas, je commence à avoir peur, je cherche une explication rationnelle : Ai je trop bu, est ce la fatigue, Ai je été emporté par un lâcher de barrage, serait ce le purgatoire … ? Dans le même temps, une, puis deux, puis trois march brown se posent sur mon waders, c’est alors que je repose mon regard sur le lisse : des centaines de mouches de tout type dévalent le lisse et certaines finissent discrètement leur vie en s’engouffrant dans des remous très discret. Il y en a par dizaine. Je jette un coup d’œil en l’air et ce n’est plus une bergeronnette que je vois mais cinq. Suis-je au paradis ? N’aurai-je pas vu ma fin ? C’est alors que je me retourne et à ma grande surprise, je vois une 4cv passer sur la route en surplomb. Incrédule, je re regarde ma montre et plus particulièrement la date. Je lis 8 mars 1946. C’est donc ça, j’ai fait un bond dans le passé. Voilà pourquoi la vie est si pléthorique autour de moi. Ah si tous mes amis pêcheurs pouvaient voir ça, c’est féerique. J’ai perdu une demi heure je ne sais combien de temps va durer cette magie, je dois en profiter un maximum avant que le dieu des pêcheurs ne reprenne ce cadeau qu’il me fait. Imaginez des centaines de mouche devant moi et à bien y regarder, devant chaque poste, un poisson qui se nourrit. Oh pas tous des monstres mais des poissons de toutes tailles. Des petits, des moyens et des gros. Je n’ai jamais vu ça, c’est incroyable mais pourtant je suis là et cela se passe. Il est temps d’en profiter … Je tente le premier et au premier passage il prends, me gratifie d’un beau combat et une fois à l’épuisette se mets à me parler. Je sais plus où j’habite. Que se passe t’il ? Décidément cette ouverture restera dans ma mémoire à jamais. Qui me croira ? Et si je finissais mon existence ici. Si c’était mon cadeau avant que mon âme s’envole à tout jamais. Non, restons lucide. C’est une bizarrerie comme il en arrive à tout pêcheur. Une histoire abracadabrantesque … S’engage alors une discussion avec la truite. Truite : Bonjour cher pêcheur, je savais que tu allais venir, j’ai pris ta mouche afin de pouvoir t’expliquer la raison de ce voyage dans le temps. Moi : Ah bon, moi qui croyais que j’avais réussi un coup magistrale me voilà remis à ma place. Tout ceci est tellement étrange, toute cette vie autour de moi c’est incroyable. Dire que j’étais là il y a deux heures quelques années plus tard, j’en perds mon latin, et la vie n’était que peu présente. Que se passe t’il, explique moi s’il te plait. Je ne tiens plus, toutes ces truites qui se nourrissent, je ne peux résister, fait vite je t’en prie. Truite : Soit patient, je vais t’expliquer. Ce voyage est l’occasion pour toi de constater le mal qu’a fait ton espèce à la nôtre et à nos compagnons qui peuplent la rivière et ces abords. C’est alors que les trois march brown présentes sur mon waders se mettent à me parler en cœur : March brown : La truite dit vrai, regarde bien autour de toi, regarde tous ces êtres qui vivent ici. Ils sont tous heureux malgré les dangers présents. Et d’un coup une bergeronnette vient se poser auprès de moi et se mets elle aussi à me parler : Bergeronnette : Pêcheur, écoute mon amie truite et mes compagnes march brown, nous sommes les habitantes de ces lieux et nous t’acceptons chez nous. Nous acceptons que tu sois un prédateur, c’est dans l’ordre des choses. Je coupe alors la parole de la bergeronnette : Moi : Tu sais, je fais du no kill… La bergeronnette reprend alors la parole : Bergeronnette : Le no kill n’a rien à voir là dedans. Certes tu remets mon amie truite dans son milieu une fois l’avoir séduite, mais que fais tu pour mes amis les invertébrés dont nous nous nourrissons elle et moi et que fais-tu pour moi ? Avant de sentir cette chaleur t’envahir, tu étais ici et tu as pu voir de tes yeux la différence. Garde cette image en toi et ne l’oublie jamais. Truite : Voilà, je pense que tu as compris maintenant, tu es responsable de ton malheur et du nôtre. Cette ouverture 2008 aurait pu ressembler à ce 8 mars 1946, il aurait suffi que nous vivame en harmonie durant toutes ces années passées. Ton espèce a fait un choix tout autre et ils vous incombent de rétablir cette harmonie perdue car nous, truites, invertébrés et oiseaux, nous ne pouvons rien faire d’autre que d’essayer de survivre alors que nous souhaiterions juste vivre … Abasourdi et ne sachant que dire, je resta là, décontenancé. Au fond ces animaux ont raison, c’est mon espèce qui est la cause de leur malheur… Perdu dans mes pensées, j’entends un bruit, comme un bip assourdissant, je l’occulte mais il est lancinant insistant et je fini par ouvrir un oeil puis l’autre, je réalise alors que j’ai rêvé, je suis dans mon lit, il est 8 heures et il est temps de se lever pour aller faire l’ouverture 2008 … @+