Chahuté.

10 juin 2012

19 - Corrèze

Dordogne

fly.only

La pluie a eu le bon goût de s’arrêter de tomber mais la roue avant de mon VTT m’envoie sans cesse des gouttes d’eau dans le visage tandis que celle de derrière macule consciencieusement mon dos. L’air sent alternativement l’humus, les champignons, les flatulence des limousines ou la fumée dans la traversée des villages. Au bord de l’eau, quelques mouches provoquent l’activité des bergeronnettes. Des sulphures en petit nombre, des sedges mais aussi des petits plécos jaunes indiquent que c’est la pleine saison des insectes sur la Dordogne. Mais contrairement à l’an dernier où la saison était terminée en raison de la sécheresse et des températures élevées, les hostilités peinent à démarrer. En raison du débit, mon fidèle bateau a du mal à éviter de se plaindre. Ces grincements inhabituels m’alertent sur la puissance du courant. Et il ne me faut pas longtemps pour me faire sérieusement bouger dans le premier goulet traversé. Les vagues me font tanguer et finissent de me mouiller. L’eau mâchée a favorisé la présence de nombreux pêcheurs au vairon ; ombres furtives qui disparaissent à l’approche du bateau. Je ne saurai donc pas si le poisson est dehors autrement que par mes propres moyens. Mais malgré tous mes efforts, les superbes postes que je peigne scrupuleusement sont désespérément vides. Dans un grand remous inaccessible du bord, j’ai ma première touche. Un poisson de taille correcte qui se décrochera arrivé en surface. Trois lancés plus tard, c’est un autre poisson qui me jouera le même tour. Puis plus rien et surtout pas de gobages. Cela est symptomatique d’une pression de pêche élevée pour la localisation des touches et du fait que j’utilise une mouche qui déclenche les poissons mais pas encore assez pour les piquer fermement. Il faudra la travailler. Dans ces eaux remuantes, ma principale crainte est de perdre une rame. Et au milieu du parcours, j’ai une première alerte. Dans un passage peu profond, une des deux rames se bloque sous le bateau et se trouve éjectée. Le choc sur ma jambe me donne l’adrénaline nécessaire pour en un dixième de seconde tenter de la rattraper. Mais c’est peine perdue, elle s’éloigne du bateau. C’est avec l’anneau de pointe de ma canne que centimètre par centimètre je la ramènerai à portée. La deuxième alerte sera encore plus chaude. Nouveau blocage nouveau choc mais cette fois-ci la dame de nage est arrachée, cassée à la base. Par réflexe je rattrape l’ensemble mais ma canne posée sur le fond du bateau est subitement entraînée par le streamer qui vient de s’accrocher au fond. Tout c’est joué très vite mais là encore plus de peur que de mal. Je me suis bien fait bougé par la belle une fois de plus aujourd’hui. Un kebab salvateur me fera reprendre des forces. A minuit, après avoir soigné les bobos, je suis encore entrain de monter quelques mouches un poil plus grosses. Et dès 7 heures, il faut que je donne de la meuleuse pour réparer le bateau avant de partir au travail. Car j’ai encore des tests à faire : nouvelle canne, nouvelle soie, nouvelles mouches… La vie est un éternel recommencement.

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