Les Nives étaient encore un peu fortes à cause des pluies récentes mais l’eau était malgré tout à un niveau acceptable, ainsi que d’une relative limpidité. Le grand soleil implacable n’a en revanche pas permis de pêcher avec une grande efficacité pendant la journée. Il y a eu toutefois un peu d’activité en fin d’après midi et en soirée. Je vais maintenant vous raconter une histoire. L’histoire de la truite du pont. Tout le monde la connait cette histoire, cette truite aussi d’ailleurs, mais je vais vous la raconter quand même. Nous voici donc sur un pont. Bien sûr, nous regardons l’eau, sans grande conviction toutefois car la journée a été calme pour le moment. Christophe me montre une truite, collée à la pile. Je regarde, elle n’y est pas. Elle n’y est plus. On l’a calé du haut du pont? Il me raconte un bobard? De mauvais goût après une journée aussi maigre … je le chambre un peu mais on regarde de nouveau quelques minutes plus tard et je la découvre enfin. Un beau poisson. Très beau même car ceux qui veulent mettre des chiffres sur tout lui donneraient sans sourciller ses cinquante centimètres. Et en plus, elle gobe. Et pas qu’un peu. Discrètement, certes, mais la belle est bien à table, habilement positionnée le long de cette pile de pont oblique qui lui facilite la tâche en concentrant au dessus d’elle toutes les particules dérivant en surface. Petit détour pour arriver au bord de l’eau. Je me prépare bien soigneusement, hanté par le spectre d’un poisson encore plus joli raté il y a quelques étés sur la Dordogne, le long d’une des piles du vieux Pont d’Argentat, au mois d’août, en plein soleil … Vu la taille du poisson un 14% n’est pas de trop et je me trouve bientôt en situation de lancer. Une branche à droite, un bosquet à gauche. Pas aussi évident que cela semblait du haut du pont, mais le lancer est tout de même possible. D’ailleurs mon oreille de lièvre lui dérive aussitôt au dessus de la tête. Gobage ! Ferrage … ! Ah, non, ca n’etait pas sur moi. Elle ne gobe plus .. calée la belle ? Elle nous rassure aussitôt en reprenant son rythme, gobant lentement et paisiblement les petits voiliers qui ont la malchance de passer de ce côté ci de la pile. Nouveau lancer, dans le rythme. Techniquement, tout est propre : longue pointe, mouche astucieuse, fil relativement fin, poser moelleux en évitant les branches latérales, planant entre les feuilles. Ca ne drague pas, elle est en place. Naturellement, évidemment, mécaniquement, elle se saisit de ma mouche avec sa lenteur et son tempo habituel. Et moi, à l’autre bout, je ferre. Le fil se tend. C’est gagné … mais immédiatement la soie se détend et retombe sur moi comme pour un arracher raté de débutant. L’hameçon n’a pas trouvé prise. J’ai ferré certainement trop vite, habitué à répondre du tac au tac aux montées nerveuses des truites de taille plus modeste. On attend un peu mais elle ne se remontrera pas. On dit qu’on n’apprend que de ses échecs, et bien je viens de prendre une bonne leçon. Une grosse truite qui gobe lentement se ferre lentement. Recopier 100 fois. Amen. Le coup du soir se terminera ailleurs, croisant au passage un joyeux moucheur sans panier (nokill?) trimballant deux bouts de viandes, deux truites pendouillant au bout de la main, les doigts dans les ouïes et le sang sur les mains. Il vient d’écumer le coin qu’on avait l’espoir de pêcher donc on remonte à la va vite un peu plus haut mais je manquerais la seule truite vraiment en poste qui faisait de gros sploutchs sur les premiers grands sedges de l’année. Le reste du week end fut ponctué par la captures de quelques truites dont une très jolie qui sera en photo dans la future rubrique « les truites de vos régions, un patrimoine à protéger ». Truite remise à l’eau devant un pecheur au toc un petit peu étonné. La discussion qui s’en suivit aura peut être un petit peu influé la façon dont il aborde la rivière et ses truites sauvages. La plus petite du week end est en photo. Admirez les couleurs et la robe. Je ne vous parlerais pas du coup de ligne… Il n’y a pas que la taille qui compte finalement.
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