Une envie d’aller dans l’eau, de voir la rivière et peut-être des poissons me presse ce soir. Les eaux sont tendues, louches , du vent remonte le secteur choisi, recourbant les feuilles des aulnes. Aucun insecte, rien d’encourageant. Ce nouveau bas de ligne servira d’invite à poser la phrygane patouillante. Remonter la bordure, reflets, remous. Une graminée inclinée capture le fil et la mouche tirée par la soie sille ; un poisson tente de s’en saisir à l’instant où elle quittait l’onde. Plusieurs tentatives, une mouche différente, plus aérienne mais non, elle a compris et boude. Je continue, le bas de ligne me plaît, un peu lourdaud sur les posers mais cela doit être le pêcheur qui pétouille. P….. ! Celle -là est venue rageusement bousculer le petit navire… Se calmer, s’asseoir et ensuite reprendre la pêche, la partie. Et si j’allais voir plus aval, avec ce niveau, la bordure de renouées… Maudite fuite que je croyais anéantie, je te sens beaucoup mieux désormais en marchant vers la voiture, le pied trempé . Les turbulences provenant des remous s’éteignent au long de cette berge en un courant régulier, bien propice pour une truite aux aguets. Sur ce lisse en miniature, je ne pouvais ne pas le discerner, ce léger renflement qui vient d’avoir lieu et la bulle qui persiste, porteuse d’espérance. Le coup de la surprise, oser la patouillante sur la tête et déclencher le réflexe de la prédatrice. Elle l’a prise et elle est piquée! Elle enchaine les sauts et prend le courant. pas gagné du tout ! Nouveau saut dans l’eau plus chahutée, garder la tension et la suivre sans trébucher sur le rocher sournois tout en freinant la soie avec le plat de la main libre! La voici, prisonnière un instant, bien grasse de la provende des crues, quelle énergie ces truites de début d’été, j’adore! Mes posers sont vraiment plus doux maintenant, la tension m’a quitté et même si une curieuse vient encore noyer l’imitation… je n’ai plus froid au pied droit.
