Des millions d'écussons d'or et de rouille sont plaqués sur les rochers humides. D'autres se détachent sans cesse de la voûte frémissante . Chaque châtaignier, chaque hêtre abandonne mollement une petite touche dorée qui va du ciel jusqu'à la rivière. Entre les pierres se coincent des paquets de feuilles, et dans les gourgues, au cœur du remous très lent, ce sont des épaisseurs végétales accumulées qui tournent à peine tant elles forment des boules denses. Que donnerait la décomposition immobile de ces tonnages végétaux ? Que deviendrait le ruisseau si cet étrange étiage perdurait ?
Je remonte le cours de l'eau dans un silence anormal : ici, à cette époque-ci, le fracas des flots devrait s'imposer entre les rochers. Au contraire, les feuilles mortes s'accumulent. Etouffement.
Vite ! Crève le ciel, vienne l'eau. Et l'hiver.