Ce soir, j’ai bravé ce vent venu du Nord qui rend l’air de ce début juin si froid. La température des eaux a encore baissé ; 11°c , alors que d’habitude , on dépasse souvent les 14°C. La curiosité me pousse au bord de la rivière et je veux essayer de prendre un poisson. Cela semble difficile. Les lancers courbes se font involontairement: la brise rabat inexorablement la pointe et l’artificielle en arrière des tenues. Je raccourcis après plusieurs emmêlages le brin terminal et je scrute les bordures, espérant qu’un poisson se manifestera. Quelques olives dérivent et sont happées par ce qui semble être des assées. Une fois à gauche du remous, puis à droite , puis en aval , jamais en mouvement, les assées. Ma mouche descend la coulée dans l’indifférence générale. Je ne change pas d’imitation mais de poste et c’est une petite truite qui se fait prendre peu après. Une bordure que j’affectionne me donne un poisson plus combattif puis je cale un autre poisson devant un rocher affleurant. J’ai beau essayé autre chose, la truite ne remonte pas. Avec cette brise,les posers vers l’aval sont tendus et la mouche patine ou accélère au bon moment… Je sors de l’eau, j’ai froid, je marche une bonne centaine de mètres pour une berge plus abritée. Un joli courant vient mourir contre des vergnes et une belle bulle vient de crever en fin de trainée d’écume. J’ai moins froid soudain et je monte un belle phrygane en poils de chamois afin de bien voir où je vais poser tout ça. C’est bien les mouches un peu grosses, surtout dans la lumière de plus en plus éteinte. Une accalmie du vent et je pose mollasson; la truite la prend en se retournant , je vois son museau, deux ou trois bulles juste après et je tends la ligne. Piquée, elle réagit violemment et cherche à rompre dans la berge. Mon 10/100 est en bon état et il doit être un peu plus épais que la bobine l’annonce car je la retourne sans crainte. Mais la belle est en pleine forme et elle saute à plusieurs reprises pour retomber sur la pointe, histoire d’en finir. Elle m’oblige à la suivre un peu et je peux voir ma mouche fichée dans l’encoignure des mâchoires. Sans cela, cela ferait belle lurette qu’elle aurait regagné un couvert sombre. Un peu plus calme dans ma filoche, je te regarde. Une hybride… mais que de fougue. Je n’ai plus froid du tout!
