L’orage semble loin mais il gronde, le bougre. La météo l’avait annoncé mais cette petite voix réclame inlassablement une veine, une berge, une saulaie, un rocher immergé, bref, quoi que ce soit de relationnel aquatique. Pinaise, faut que je me soigne, non ?
Et voilà qu’Éole s’invite dans la partie ! Enfin bon, après tout, que serait un ébat halieutique chaotique sans comparses querelleurs ? Et puis, il ne me faut pas grand-chose. La tenkara Expert (car un peu de costaud ne fait pas de mal…), le level line (pour ressentir la tension et assurer un guidage « sensible » de la ligne), un bas de ligne en 18 (vaut mieux assurer), et les 2 streamers pas trop plombés (un certain « shallow » est de rigueur), montés à la va-vite le temps de la prise de décision, enfin, si je puis dire décision…
A l’ouverture, une rafale de poils et le coffre devenu béant, accueille le toutou impatient. 10 minutes de route et me voici sur un chemin de flaques. Les aulnes dansent, les saules gigotent et des gobages de gouttes par millier égayent la surface. C’est quand même sacrément bon, ces piqûres de rives !
À l’ordre, il a sauté, fin fou à patauger, à dégourdir ses papattes et s’engouffrer dans la moindre ouverture végétale. Il est vrai qu’à force, il commence à les connaître par cœur ces sites de balade, surtout ces méandres rivulaires où chaque opportunité de bain ne se fait jamais à reculons…
Je m’infiltre, une ronce puis deux, les joies piquantes des coins pénards. Un petit sifflement de rappel, un « assis » et tranquille, je déplie la canne. C’était sans compter cette traîtresse de branche où avec l’aide d’un souffle bien dirigé, s’emprisonna le level line. Déroulage en règle, nœud de jonction du 18 et le choix du leurre se portera sur le vert/marabout blanc. Relativement protégé, je ferai une pêche classique de bordure.
Les postes s’enchaînent plus ou moins rapidement, entre pliage et dépliage pour accéder aux postes. Les lancers sont arbalètes, pendulaires voire traditionnels selon le dégagement. Quelques petites prises quand même mais beaucoup de tapes rageantes ou de décroches au combat. L’espèce est vorace certes, curieuse plutôt, mais elle reste coriace jusqu’au bout !
J’atteins le fond de l’anse. Branches entremêlées, systèmes racinaires, élodées à outrance, remontées de myriophylles et filaments verts fluo forment un superbe panel. Plus ou moins 1m de profondeur, le spot est prometteur ! Par contre, le lancer se fera latéral, entre deux descentes arbustives. Le streamer est retenu tant bien que mal pour une immersion en douceur. j’accompagne la plongée, 5cm, 10cm, 15cm et, sur la première traction, une gueule sortie des amas vient engloutir mon panache blanc. La violence de l’attaque a suffit au ferrage et c’est la canne dans l’eau que j’essaie de ressortir la bête de son obscure. Les coups de tête sont terribles, je sens le fil en une tension formidable, glisser ou plutôt frotter les branches dans cet abri indéniable quand soudain, le voici vigoureux, filer au large. Je bride, avance prudemment mais c’est déjà trop tard, c’est le pied sous l’eau qu’un saut magnifique me gratifie cette entrée aquatique. Il n’en restera pas là !
Plusieurs chandelles à la suite de rushs et contre-rushs me laisseront à penser plus d’une fois à la casse ou la décroche. C’est la canne dans les branches me surplombant que l’animal se rendra, non sans un dernier soubresaut. Quel bel adversaire que ce dénommé Black !!
Certes il n’a pas de points, mes nives sont viscérales mais mister B est un merveilleux palliatif…
Pêcheurdenature