Ciel pur, juste strié par une traînée d'avion. Des ébauches vaporeuses de feuillages naissants ponctuent les flancs des collines et ravissent le regard. Petits nuages blancs des merisiers, il fait si doux que le sourire semble de mise. Je laisse mon ami plus haut sur le grand pool, une couasne nous sépare désormais. Le flot me paraissait trop soutenu et j'ai trouvé une zone intermédiaire, en bordure du vif, là où l'écume suit une ligne sinueuse par les vaguelettes adoucie. La nymphe ploque et mes yeux suivent sa dérive permise par la fluorescence de la ligne. > Je me suis obligé à ne pas nouer une mouche sèche et à ne pas contempler paresseusement les flots… Aucune activité en surface; cela aide. L'extrémité de la soie s'arrête et pique du nez, je songe à un galet moussu mais la ligne prend soudainement le large et je suis dans l'instant. Le poisson descend puissamment et la ligne file. Je n'en mène pas large avec ma pointe en 12 centièmes, à la limite de la rupture plus que probable. Inquiétude aussi lorsque je vois la bascule du grand courant, les vagues, les eaux sombres et la berge concave profonde , abrupte qui suit. Sadiquement, une couasne infranchissable semble me sourire au cas où j'aurais eu des velléités de suivre… Je réussis à rentrer de la ficelle tout en descendant sur ces savonnettes de galets et à conduire l'animal vers ma berge, vers moi. La longue pointe tient bon, la canne encaisse, sa courbe bien prononcée commence à me ravir. Je pense que je pourrai voir le client … Des éclairs cuivrés sous la surface, le poisson tente une dernière fuite dans le rapide. Bridé, je le hale doucement. Ce n'est pas un bécard de salmonidés mais un superbe lingot mordoré pourvu de délicieuses moustaches blanches qui s'est saisi de la nymphe. Mon ami a suivi toute la séquence et il m'avouera qu'il pensait que j'avais filoché une jolie truite. Ce sont les surprises et les charmes de la zone à … barbeaux!
