Partir avec son sac pour aller pêcher les truites d’or des lacs islandais… C’est possible !
Les plus belles photos que vous trouverez dans ce récit ont été réalisées par un de mes compagnons de voyage, Marc, photographe de talent.
Voilà le huitième pays étranger à la France dans lequel je voyage pour assouvir ma passion pour la pêche à la mouche.
Je n’oublierai jamais le premier pays qui m’a introduit à l’art du voyage et qui fut l’Ecosse, où j’ai pu découvrir entre la musique d’une nouvelle langue et les fragrances du whisky, la pêche du saumon atlantique.
Puis la Mongolie m’a percé le cœur d’une flèche acérée de curiosité pour les mystères de la steppe, et toute une famille de poissons primitifs cachés aux confins de l’Asie centrale, qui marivaudent entre les tons turquoise de la rivière Chuluut, et les reflets violet métal des taimens.
J’aime jongler entre les destinations, mais la Mongolie a tellement tourmenté mon esprit que j’ai du céder à la tentation par 2 fois, et la visiter à l’aube, et au crépuscule des saisons. Mon premier voyage au pays de Gengis Khan m’a fait découvrir l’ébullition de la vie printanière, et mon deuxième voyage au pays du vertige horizontal m’a embrasé les yeux avec les couleurs flamboyantes de l’automne.
Dans le tourbillon de ma vie plutôt chançarde je dois l’avouer, la fièvre du voyage associée à une passion dévorante pour la pêche à la mouche m’a poussé à aller pêcher à l’étranger des que mes disponibilités et mon portefeuille me le permettaient.
Les rencontres aussi bien au bord de l’eau que sur les forums, m’ont permis de rencontrer des personnes exceptionnelles, et de partager des moments inoubliables.
Mais c’est mon maître, Patrick Godey, qui m’a fait découvrir la Moselle, à qui je dois tout ce bonheur aujourd’hui.
Rêveries d’ombres communs dans les pays nordiques, invitation mondaine sur les rivières teintées d’Irlande, ou encore s’envoler pour une année de travail au Canada, et aller pêcher les saumons pacifiques comme on se fait un coup du soir en France dans son village natal.
Mais je ne voyage pas que pour le poisson physique, le décompte des prises, l’enchaînement des gobages, et des fours qui s’ouvrent pour se refermer sur des nymphes en eau cristalline.
Non, je me considère comme un esthète, un voyageur entier qui traîne ses basques en flairant l’aventure comme un clébard solitaire qui n’a que l’horizon comme limite.
Je voyage pour la dimension spirituelle, pour le ressenti, pour l’atmosphère. La baffe est la même quand je galère à ne prendre qu’une seule truite dans les Carpates roumaines, qu’un saumon atlantique me salue d’une chandelle avant de rompre mon bas de ligne, ou alors quand je m’extasie devant le gobage d’un ombre sur la Moselle.
Le retour aux sources dans la nature extrême est profondément sain pour le corps.
En 2012, c’est un luxe que de pouvoir s’endormir dans le vrai silence, de voir un aigle pêcheur fendre la surface de l’eau devant soi, ou d’observer des poissons dont le génome n’a pas été souillé par des apprentis sorciers.
Je pars du principe que la nature est là pour vous mettre des grandes claques derrière la nuque, et vous rappeler combien elle est belle. Le voyage est un art, depuis le moment où l’on pointe la destination choisie du doigt sur une carte jusqu’à ce qu’on ferre l’objet de ces rêves.
Avec le recul, je m’étonne parfois de la capacité que j’ai à regarder la carte du monde égoïstement à travers les œillères de mes passions. Les Etats-Unis ne m’évoquent pas la Statue de la Liberté, mais des rivières ou l’on pêche dans de vertes prairies au milieu des bisons. Les pays de l’est ne sont pas pour moi des pays bon marché où l’on peut se rincer pour pas cher un week-end dans une capitale tendance, mais bien des paradis de la pêche à vue.
Avec mes huit minables pays au compteur (oui, je voudrais voyager encore plus), j’aime à regarder la carte du monde où j’ai planté des punaises sur mes conquêtes halieutiques, tel un baron fou qui voudrait avoir séduit tous les poissons du monde avec ses mouches. Mais lorsqu’on a une telle passion qui brûle en soi, ce n’est qu’une question de temps (et un soupçon d’argent) pour réaliser ses rêves.
Il y a donc les rêves que j’ai réalisés, et qui me servent de carburant pour mon futur, et ceux que je vais réaliser qui sont le comburant. L’association des deux réactifs garantit un mode de locomotion spirituel inépuisable.
Au vu de la taille de notre planète, il me reste donc un nombre de pays assez conséquent où je rêve encore d’aller faire traîner mes mouches.
Quoique, me direz vous, il y aurait peut être de l’eau sur Mars, et quel moucheur fasciné n’aurait pas pensé une seconde à aller pêcher sur Mars…
Mars, la Patagonie, la Franche-Comté, ou le parcours interdit sur ma rivière natale, tout ça c’est la faute du syndrome de la berge opposée.
Tout ce cocktail d’images qui bout dans ma tête me pousse à assouvir ma soif de salmonidés plus beaux les uns que les autres.
Plus d’espèces, plus de couleurs, plus de paysages aquatiques, plus d’eaux limpides ou s’ébattent paisiblement mes compagnons de jeu, que j’aime à berner avec mes mouches, pendant quelques secondes les contempler, les relâcher, et surtout les remercier d’être aussi beaux.
S’ils savaient tous ces ombres et ces truites le temps que je passe à construire mes projets halieutiques les plus fous simplement pour leur présenter mes mouches que j’ai fait avec amour de la nature et que mon seul but est qu’ils les acceptent.
Tellement de cartes à explorer, d’aéroports à traverser, de montagnes à franchir, et de mouches à créer pour séduire les objets de mes rêves.
Du haut de mes 26 ans, j’ai compris que lorsqu’on prépare son voyage de pêche, on est déjà en voyage. Un bureau encombré d’une carte de la Mongolie ou sont étalés des imitations de sauterelles, un moulinet bouffé par le temps, un GPS, et un passeport écorné par la bourlingue….Vision de rêve !
Imaginer son sac en vue éclatée la veille du départ, et se demander pour la millième fois si l’on n’ a rien oublié.
Quelle question stupide. Je sais bien que si j’ai dans mes bagages ma canne, mon moulinet, et ma boîte de mouches je n’ai rien oublié, puisque je possède l’armure du « moucheur-rêveur », celui qui se contente de la beauté de la nature pour être heureux.
La préparation du voyage de pêche est donc l’antichambre de la gloire.
Elle nécessite 3 éléments :
– La curiosité
– La logique
– L’organisation
La curiosité est le moteur du voyage, le carburant. C’est elle qui pousse par exemple à s’intéresser aux insectes du pays convoité, ou bien même à grimper un col de plus, pour vérifier si les truites ne sont pas plus belles dans l’autre vallée.
La logique est nécessaire, car lorsqu’on part s’isoler dans la nature en autonomie, on revient aux basiques. Exit le superflu. La journée, par nécessité, devient logique. Pêcher, manger, dormir. Plus rien d’autre ne compte, car il n’y a pas d’autres distractions dans une rivière au bout du monde, et les poissons sont trop nombreux dans les milieux indemnes de la main de l’homme pour qu’on les laisse tranquilles !
Le moucheur vertueux n’oubliera pas d’ouvrir son esprit à toute la nature, et savoir admirer aussi bien la parade nuptiale d’un couple d’oiseaux, de rester bouche bée devant le soleil de minuit, et surtout de se dire que si le paradis existe sur terre, il doit ressembler au décor que l’on a en face de soi.
Pour finir, l’organisation : c’est le ciment du voyage. Elle va lier entre eux les éléments essentiels dans la structure du voyage de pêche. Il faut savoir faire un choix judicieux dans le panel d’éléments que nous propose notre société qui dégueule de technologie. Emmener un Iphone et une belle chemise serait un choix en totale contradiction avec l’esprit de l’amoureux de la nature.
Un explorateur lâché seul dans la nature fera des choix pertinents parmi la myriade de technologies que l’on peut emmener dans ses bagages. Un GPS et un purificateur d’eau semblent un choix judicieux. Ce sont des accessoires qui permettront d’aller plus loin dans la nature, sans nuire.
Ne jamais oublier, le rythme ternaire du voyage : pêcher, manger, dormir ;
Le choix des mouches que l’on emmène revêt donc une importance particulière, car chaque pays a ses particularités entomologiques, ce qui rend les boites de mouches voyageuses si colorées…
Je sais bien qu’il n’y a rien de plus pénible que de monter des mouches qui ne serviront qu’une fois, et qu’on ne pourra pas réutiliser sur ses rivières françaises. Elles ne serviront qu’une fois certes, mais quel événement ! Un streamer violet pour un arctic charr, une émergente rose pour un ombre arctique, que dis-je, une souris ultra réaliste pour un taimen !
La boîte du moucheur voyageur relève plus de l’œuvre d’art que du simple assemblage des matériaux sur un hameçon (sans ardillon, cela va de soi).
La préparation au voyage est donc un art avec ses règles de base établies.
Pour l’immersion dans la nature sauvage, il faut s’inspirer des randonneurs au long cours, et autres trekkeurs invétérés qui possèdent une multitude d’astuces pour gagner en poids et taille de sac.
Ce sont des détails comme la forme des pâtes que l’on emmène, ou la position des affaires dans le sac en fonction de leur poids.
Internet et ses forums débordent de milliers d’articles très intéressants sur la préparation au voyage ; c’est un sujet passionnant, mais sur lequel je ne vais pas m’étendre ici.
Mon petit empirisme sur le voyage de pêche m’a donc permis d’acquérir les éléments de base essentiels permettant de répliquer les randonnées-pêche autour du globe.
Je revenais donc sur ma carte piquée de mes huit malheureuses punaises, reflet de tous mes souvenirs inoubliables de pêche que m’évoquait le nom de chaque pays visité.
Plein de mauvaise foi, je me posais la question suivante « Quelle sera la prochaine destination ? »
Dans l’ironie de la question, je savais déjà que j’aurais besoin de sept vies pour faire le tour de la pêche à la mouche.
Et puis, il suffit qu’on me demande dans quel pays je rêverais d’aller pêcher pour que je débite dans la seconde dix noms de destinations en justifiant lourdement pourquoi les rivières ou les poissons sont fascinants.
Il faut maintenant avouer que je ne suis pas spécialement fortuné et que les billets d’avion « overseas » ne sont pas forcement dans mes moyens.
Ce dernier argument réduit donc convenablement l’éventail de mes destinations.
Les deux choix mûrement réfléchis étaient donc les suivants pour cette année 2012 : l’Islande ou le Yellowstone
Chaque destination avait ses inconvénients : un billet un peu trop cher pour aller pêcher aux Etats-Unis, mais une législation trop rigide et des permis trop chers pour la pêche en Islande. Cruel dilemme…
C’est à ce moment qu’internet intervient. Moisson d’informations sur les forums.
Récolte : » Uniquement des propriétés privées, et la pêche du saumon en Islande est extrêmement chère « .
Ayant déjà gouté à la pêche du saumon atlantique, je savais que ce poisson n’était plus l’objet de mes recherches, car j’ai jugé sa pêche comme trop aléatoire. (Bien que Philippe Boisson et Jacky Roerhig avaient ravivé mon envie de prendre un saumon à vue).
J’étais dans une impasse. Que choisir ?
En creusant un peu plus profondément entre les lignes des pages web, j’ai ciblé mes recherches sur la pêche de la truite en Islande. J’ai trouvé un bon compromis, un permis qui permet de pêcher un bon nombre de lacs (et les rivières qui connectent) pour 36 euros. Voilà un bon début !
Le problème du droit de pêche était donc résolu, il ne restait plus qu’a dresser un budget « à la louche » pour estimer le coût total du voyage.
Voici l’addition ci-dessous par personne sur une base de 3 compagnons de voyage :
36 € pour les permis de pêche
280 € pour le billet aller retour Francfort Reykjavik
90€ pour les billets de bus aller retour jusqu’au nord de l’Islande
60 € pour le carburant aller retour Epinal Francfort
20 € de parking à l’aéroport
20 € pour une bonbonne de gaz sur place
20 € de nourriture
Soit un budget ficelé autour de 500 € sur une base de 15 jours de vacances, avec 13 jours de pêche « into the wild », et 2 jours de voyage
Nous partirons donc à 3 ; moi-même, mon ami Marco, qui m’a déjà accompagné en Mongolie, et son ami Ludo. Equipe de choc !
Les billets ont été réservés bien sûr 6 mois à l’avance, il n’y a plus qu’à affiner le voyage.
La question, où aller en Islande ?
Lorsqu’on choisit un pays pour y pêcher, la géographie impose des choix.
Forcément, dans un premier temps, il faut s’éloigner de la population et des grandes villes ; c’est une chose assez facile en Islande, car la densité de population culmine à 3 habitants/ m2, ce qui laisse de la place pour trouver un petit coin de paradis.
En étudiant la carte de l’Islande, on se rend compte que le sud est une région volcanique active.
A moins de vouloir pêcher dans des coulées de magma, ce n’est pas forcément la meilleure destination pour l’exploration… (Bien qu’il y ait de très bonnes rivières au sud de l’Islande).
Autre argument limitant : les tarifs pour se faire transporter en bus en Islande, qui sont assez élevés.
Nous avons donc ciblé notre choix sur une pointe au nord ouest de l’île de glace.
Riche en lacs, bordée par l’Océan Glacial Arctique.
Nous serons situés à une vingtaine de kilomètres au sud du Cercle Polaire.
Les conditions ne pourront donc pas y être pires que ce que j’ai connu au Yukon, ou en Laponie…
Un article de Stanislas Freyheit Alias Mrmouches Artisan Monteur de mouches de pêche professionnel.
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